Faute inexcusable de l’employeur : les mesures prises doivent être efficaces et suffisantes

En cas d’accident de travail, la faute inexcusable de l’employeur peut être reconnue si celui-ci avait conscience du danger auquel le salarié était exposé. Seule l’efficacité des mesures prises par l’employeur peut lui permettre de s’exonérer de toute faute.

En matière de sécurité au travail, l’employeur est soumis à une obligation générale de sécurité (Art. L4121-1 C. Trav.). Il a la charge de veiller au respect des règles de santé et de sécurité au travail.

En cas de non-respect ou de violation de cette obligation, une faute inexcusable peut être reconnue à son encontre. L’article L452-1 du code de la Sécurité Sociale précise que lorsque la faute inexcusable est reconnue, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire.

Dans l’affaire qui est présentée, un médecin urgentiste a été victime d’une agression par une patiente sur son lieu de travail. L’équipe de soins a réussi à séparer les protagonistes et le salarié médecin a saisi les tribunaux afin de voir reconnaitre la faute inexcusable de l’employeur.

En effet, depuis de nombreuses années, les actes violents avaient fortement augmenté, notamment en raison de l’engorgement des services d’urgence et de l’insatisfaction des clients. Ce que l’employeur avait pu constater. De ce fait, la conscience du danger par l’employeur était avérée et ne pouvait être remise en cause.

Pour s’exonérer de toute faute inexcusable, l’employeur devait donc prouver qu’il avait pris des mesures visant à prévenir ce genre d’incident. Pour cela, il a mis en avant le recrutement d’un maitre-chien ainsi que l’organisation de formations sur la gestion de la violence et les situations traumatisantes.

D’autres mesures ont également été prise, mais après la survenance de l’accident (recrutement d’un agent de sécurité, fermeture de la zone de soins…).

Malgré ces dispositions prises, l’employeur soulignait également que le risque zéro n’existe pas et qu’aucun dispositif supplémentaire n’aurait pu empêcher l’agression.

Cependant, en matière d’AT/MP, il ne suffit pas à l’employeur de démontrer que des mesures avaient été prises pour s’exonérer de toute faute inexcusable. Faut-il encore que ces mesures soit réellement efficace !

En effet, les arguments présentés par l’employeur n’ont pas convaincu les juges, que ce soit en appel ou en cassation.

Ceux-ci ont estimé que le recrutement d’un maitre-chien était manifestement insuffisant à prévenir les risques d’agression, et l’organisation de formations constituait une réponses sous-dimensionnée par rapport à la réalité du risque encouru.

En conséquence, les juges d’appel et de cassation ont estimé que la faute inexcusable de l’employeur était existante dans la mesure où celui-ci n’avait pas pris de mesures efficaces pour éviter ce risque.

Cass. 2ème ch. Civile du 29 février 2024, n°22-18.868