Les règles de remplacement des élus au CSE Central

Les articles L2316-4 et R2316-1 du code du travail apporte des précisions à propos de la composition du CSE central. Le législateur précise que le CSE central est composé d’élus désignés par chaque comité d’établissement de l’entreprise, à raison d’un seul délégué titulaire ou suppléant, ou d’un ou deux délégués titulaires et un ou deux délégués suppléants, sans que le nombre total des membres ne dépasse 25 titulaires et 25 suppléants.

Cependant au gré de l’évolution professionnelle des élus, la composition du CSE central peut être amenée à évoluer. En effet, un élu peut décider de mettre un terme à son mandat, ou encore de quitter son entreprise. Dès lors, il est essentiel d’avoir des règles claires précises à propos des modalités de remplacement des élus afin de parer à toute éventualité.

Sur ce point, les juges de la Cour de cassation ont apporté récemment une moitié de réponse.

Les règles de remplacement des élus au CSE :

L’article L2314-37 du Code du travail édicte les règles de remplacement en cas de cessation des fonctions ou absences temporaire d’un membre titulaire au CSE « classique ». Celui-ci stipule que « Lorsqu’un délégué titulaire cesse ses fonctions pour l’une des causes indiquées à la présente section ou est momentanément absent pour une cause quelconque, il est remplacé par un suppléant élu sur une liste présentée par la même organisation syndicale que celle du titulaire. La priorité est donnée au suppléant élu de la même catégorie. S’il n’existe pas de suppléant élu u sur une liste présentée par l’organisation syndicale qui a présenté le titulaire, le remplacement est assuré par un candidat non élu présenté par la même organisation. Dans ce cas, le candidat retenu est celui qui vient sur la liste immédiatement après le dernier élu titulaire ou, à défaut, le dernier élu suppléant. A défaut, le remplacement est assuré par le suppléant élu n’appartenant pas à l’organisation du titulaire à remplacer, mais appartenant à la même catégorie et ayant obtenu le plus grand nombre de voix… ».

Dès lors que le remplaçant est désigné, celui-ci occupe le poste de l’élu titulaire soit jusqu’à son retour si l’absence est temporaire, soit jusqu’au renouvellement de l’institution si l’absence est définitive.

Il s’agit là des seules règles de remplacement évoquées par le législateur, mais celle-ci ne concernent que le CSE ordinaire, et non le CSE central

L’application des règles de remplacement du CSE « ordinaire » au CSE central :

Dans un récent arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 6 décembre 2023, n°22-21.239, les juges de la Cour ont eu à déterminer les règles de remplacement d’élus absents, mais pour un CSE central.

Dans les faits, deux salariés d’un établissement d’une société, respectivement titulaire et suppléant du CSE central ont quitté leur entreprise et ont donc mis un terme à leurs mandats. À la suite de ces départs, le CSE d’établissement a désigné deux nouveaux membres en remplacement, un titulaire et un suppléant au CSE central.

Or le premier problème à résoudre est celui de savoir quelles sont les règles qui vont trouver à s’appliquer dans cette situation, puisque l’article L2314-37 du code du travail vise le « CSE ordinaire » et non le CSE central.

D’ailleurs, à ce titre, la société avait contesté la désignation de ces remplaçants au motif que les règles de l’article L2314-37 du code du travail ne concernent que les « CSE ordinaire ».

Cette contestation a porté ses fruits puisque la société a obtenu gain de cause. La désignation des remplaçants a donc été annulée. Cependant, le CSE d’établissement et un syndicat ont fait par de leur désaccord et ont saisi la Cour de cassation pour revenir sur cette annulation.

Cette fois, devant les juges du fond, la société n’a pas obtenu de gain de cause, puisque la décision précédente a été annulée. En effet, la Cour retient que si aucun texte ne prévoit le remplacement des membres titulaires du CSE central, le texte qui prévoit les modalités de remplacement d’un titulaire au CSE « classique » est applicable, faute de disposition contraire, aux titulaires du CSE central.

Dans cette situation, l’article L2314-37 du code du travail est totalement applicable.

Un ordre de remplacement défini, mais une interrogation encore existante :

Les juges de la Haute Cour ont donc tranché en faveur du syndicat et du CSE d’établissement. Les règles de remplacement des élus inscrites dans le code du travail s’appliquent également aux membres des CSE centraux, peu importe que l’article L2314-37 ne l’évoque pas.

Cette décision permet d’apporter une première réponse au regard du remplacement de l’élu titulaire. Lorsque le membre titulaire du CSE central cesse ses fonctions, peu importe la raison (un décès, un une démission, une rupture conventionnelle…) il doit être remplacé dans les conditions prévues à l’article L2314-37 du code du travail, à savoir :

  • D’abord par un suppléant élu sur une liste présentée par la même organisation syndicale que celle du salarié titulaire, avec une priorité donnée au suppléant élu de la même catégorie
  • Ensuite, par un candidat non élu présenté par la même organisation syndicale
  • Et à défaut, par un suppléant élu n’appartenant pas à l’organisation syndicale du titulaire, mais appartenant à la même catégorie et ayant obtenu le plus grand nombre de voix.

La Cour de cassation apporte ici une première partie de réponse puisque ces règles n’évoquent que le cas du remplacement de l’élu titulaire. Elles ne précisent malheureusement pas l’ordre de remplacement à appliquer pour un remplacer un élu suppléant.

De ce fait, les juges ont invalidé l’annulation de la désignation du membre titulaire, mais ils ont tout de même validé l’annulation de la désignation du membre suppléant. En effet, le code du travail ne prévoit pas de règles de remplacement pour les élus suppléants. Les juges ont alors décidé de suivre une application stricte des textes en vigueur. Pour eux, le remplacement des membres suppléants composant le CSE central n’est pas possible en l’absence de dispositions légales ou conventionnelles le prévoyant.

En conséquence, pour parer à toute éventualité, il parait nécessaire et pertinent, aussi bien pour les « CSE ordinaire » que pour les « CSE centraux », d’établir des règles de remplacement en cas de départ d’élus suppléant, sous peine de ne pouvoir effectuer aucun remplacement.

[Cass. Soc. 6 décembre 2023, n°22-21.239]