L’expertise sur la situation économique et sur les orientations stratégiques peut parfois s’étendre au groupe

Dans le cadre des consultations récurrentes sur la situation financière de l’entreprise, ou celle concernant les orientations stratégiques de l’entreprise, les élus du CSE peuvent avoir recours à un expertcomptable. Bien que celui-ci soit missionnée dans le cadre de l’entreprise, celui-ci peut étendre sa mission au document du groupe dont fait partie l’entreprise

Le recours à l’expertise dans le cadre des consultations :

Dans les faits, une société avait engagé la procédure annuelle d’information et consultation du CSE sur sa situation économique et financière d’une part, ainsi que les orientations stratégiques de l’entreprise d’autre part. Dans le cadre de ces deux consultations, les élus du CSE avaient fait le choix d’avoir recours à un expert-comptable, et avaient donc nommés celui-ci. Pour mener à bien ces consultation, l’expert avait demandé à la société en question de lui fournir un certain nombre de documents en plus des informations figurant dans la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE) qui est mis à disposition du CSE. L’expert avait également transmis à l’employeur le cahier des charges de ses expertises, ainsi que leur coût respectif.

En effet, l’article L2315-78 du code du travail autorise le recours à l’expertise CSE dans le cadre des consultations récurrentes (situation économique et financière de l’entreprise, orientations stratégiques, politique sociale de l’entreprise) mais également en cas de consultation pour des problématiques ponctuelles.

Périmètre de l’expertise et contestation de l’employeur :

En l’espèce, l’employeur avait choisi de contester, non pas le recours à l’expert par le CSE, mais le coût de ces expertises ainsi que le fait que l’expert entendait inclure dans son analyse le groupe auquel appartenait la société.

Du point de vue de l’employeur, du fait ce périmètre élargi au groupe, la liste des documents et le coût prévisionnel des cahiers des charges des expertises étaient disproportionnés.

Or, le code du travail autorise l’employeur à contester l’expertise auprès du tribunal judiciaire. La contestation de l’employeur peut porter sur 4 paramètres : 

  • La nécessité de l’expertise
  • Le choix de l’expert
  • Le coût prévisionnel, l’étendue et la durée de l’expertise
  • Le coût final de l’expertise.

En conséquence, l’employeur avait assigné le CSE et l’expert devant le tribunal judiciaire.

Il demandait au juge d’annuler le cahier des charges, d’ordonner à l’expert de notifier de nouveaux cahiers des charges, en excluant les éléments relatifs au groupe et de prononcer la suspension des expertises dans l’attente des nouveaux cahiers des charges.

En cas de contestation, le tribunal judiciaire statue dans un délai de 10 jours, selon la « procédure accélérée au fond ». La décision du juge ne peut pas faire l’objet d’un appel, seul le pourvoi en cassation est possible.

L’extension du périmètre de l’expertise :

Ici, l’employeur a été débouté devant les juges du tribunal judiciaire. Suite à cela, l’employeur avait formé un pourvoi en cassation. Mais une nouvelle fois, l’employeur a été débouté de ses demandes. Les juges de la Cour de cassation ont confirmé leur jurisprudence et rejeté le pourvoi de l’employeur.

Lors des consultations sur les orientations stratégiques de l’entreprise et sur la situation économique et financière de l’entreprise, la mission de l’expert-comptable porte sur tous les éléments d’ordre économique, financier, social ou environnemental nécessaires à la compréhension des comptes et à l’appréciation de la situation de l’entreprise (articles L2315-87 et L2315-89 du code du travail).

Le juge du fond en avait déduit que le périmètre de ces deux expertises pouvait porter sur la situation et le rôle de l’entreprise au sein du groupe auquel elle appartenait. La Cour de cassation approuve pleinement ce raisonnement, conforme à sa jurisprudence (Cass. Soc. 1er juin 2023, n°21-23.393).

Elle valide en conséquence le tribunal d’avoir rejeté les demandes de la société visant à obtenir la réduction du coût des expertises.

A titre d’illustration, certaines orientations stratégiques de l’entreprise peuvent être la conséquence de décisions prises au niveau de la maison mère d’une société.

Dans ce type d’hypothèse, l’employeur peut s’attendre à ce que les élus demandent à aborder les orientations stratégiques sous l’angle du groupe, et s’ils décident de recourir à un expert, élargissent le champ de l’expertise au groupe.

Cour de cassation, chambre sociale 9 avril
2025, n°23-16.503 D